L‘œuvre de Michel Potier révèle une curieuse et attirante ambiguïté : de son regard sur l’homme, émane un sentiment où se mêlent à la fois agression et tendresse. Sans doute, ce sont les qualités proprement plastiques de ses compositions et l’humour subtil qui s’en dégage, qui qui confèrent aux transgressions anatomiques cette saveur si particulière de joyeuse crudité, exempte de toute trivialité.

Mariant admirablement la liberté de la touche à des aplats rigoureusement délimités, associant de manière la plus imaginative les distorsions du réel à des préoccupations esthétiques, Michel Potier nous ouvre un monde malicieux et cocasse, finement observé – son monde – où les humains fraternisent avec quelque animal complice (poule en cocotte, renard-étole, lapin sur canapé, cochons domestiques, chats et chiens) ou (fleurs, pâtisseries, plumes d’indien et bouffées de cigarette) deviennent les objets sémantiques d’une relation entre les individus et dans le couple. Il y aurait même plaisir à découvrir ce microcosme par le biais psychanalytique ; cela expliquerait sans doute la distance constatée entre la réalité objective/rationnelle et les impertinences figuratives, généralement si mal reçues par nos contemporains.

Ce qui éloigne et distingue Michel Potier du « Pop Art » c’est qu’en s’inspirant de la même thématique, il en gauchit plus profondément la réalité, et ce en vertu d’une image sous-jacente plus riche.

L’œuvre de Michel Potier est prétexte à rappeler que toute image, toute représentation, trouvera sa justification artistique dans la spécificité de ses moyens et dans leur dimension esthétique ; autrement dit, la peinture demeure d’abord un moyen de tracer des lignes et des gestes, de placer des couleurs et des matières, qui fassent surgir des images issues de la profondeur des êtres et des choses. La démarche de Michel Potier s’inscrit naturellement dans cette optique : son esprit nous désigne spirituellement les charmes et les travers du monde moderne.